Dakh Daughters : l'âme slave à l'Opéra d'Avignon

Dakh Daughters : l'âme slave à l'Opéra d'Avignon

Il y a quelques temps, Debora Waldman, directrice de l’orchestre d’Avignon, nous faisait l’honneur de nous présenter le programme de la saison. Cheffe d’orchestre soucieuse de mettre en avant le patrimoine musical féminin du passé, elle a aussi présenté un concert/spectacle atypique, mettant ainsi à l’honneur  la nouvelle génération, en ouvrant l’opéra à ce collectif de jeunes artistes ukrainiennes nommé les Dakhs daughters.

 

Nous avons donc assisté ce vendredi 28 janvier, à l’une des deux représentations. 

L’ADN de cet ensemble est classique, au sens de savant. Toutes ces chanteuses virtuoses autant que fantaisistes étaient accompagnées par le chef et l’orchestre…. Aussi, il est à parier que le public était assez mélangé tant au niveau des goûts que des générations et probablement, aussi, en terme de mixité sociale.

Ce cabaret punk, ainsi que le dit le programme ne renie en rien ses racines accrochées à la musique savante et l’origine ukrainienne des artistes nous enchante encore davantage lorsqu’elles piochent dans le répertoire ancien de la musique populaire slave, avec ces techniques vocales particulières qui nous emmènent dans un royaume semi enchanté semi gothique.

Pour la dimension punk, attention, si pour vous le punk c’est Patti Smith, GG Allin ou pour les britons, les Clash ou les Sex Pistols, il faudra modérer votre enthousiasme, en effet, l’esthétique cabaret rappelle davantage le post-punk et la new wave que le punk, et il en va de même pour les influences musicales qui rappellent davantage siouxsie and the banshees, Lisa Gerrard ou Nina Hagen. Qui s’en plaindra? Il faut faire un petit effort de remise en contexte en s'intéressant aux descendants du punk qui irriguent de leur énergie les mouvements féministes. Ainsi, par punk, entendez surtout “pussy riot” et convoquez les images mentales que vous pouvez avoir des femen.

Ceci étant dit, aucune lourdeur militante ne vient encombrer cet opus qui convoque des éléments du Carmina Burana, du chamanisme, mais aussi le baroque ainsi qu’un brin de rock actuel.

La présence des artistes est magistrales autant qu’attendrissante, elles chantent, jouent, déclament, dansent même parfois et c’est réjouissant de voir autant d’ampleur lyrique, épique, amplifiée par  la prestation magique de l’orchestre, en cette époque où l’art se réfugie souvent dans une tiédeur rassurante. Nous oserons évoquer ce cliché durable mais non dénué de vérité qu’est l’âme slave, ce mélange de tragédie et de célébration de la vie dans ses aspects les plus rudes et les plus triviaux. Si vous avez suivi les événements qui agitent l’Ukraine, vous ne serez pas insensibles non plus à cet art qui amène à ressentir une détresse palpable en liant passé et présent.

Ce fut un spectacle enchanteur qui a pu ravir aussi bien les amateurs iconoclastes de musique savante que les fans de Dead can dance ou Heilung, voire Laibach, ainsi que les amateurs de Kusturica. Nous avons tous terminé en scandant, debout, les derniers morceaux et clappé en rythme pour les célébrer et fusionner avec leur rage aussi candide (authentique) que  contagieuse!
 

Autant de raisons de guetter leurs prochaines prestations!
 

LE SITE DES DAKH DAUGHTERS

LE SITE DE L'ORCHESTRE D'AVIGNON

 

Afin de prolonger l’expérience, n’hésitez pas à écouter ce groupe sur Band Camp et regarder cette video, intitulée “Dombas”


Adeline Wall 


Pierre Avril

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